Les êtres vivants de notre planète se distribuent dans des habitats qui remplissent les conditions nécessaires pour leur survie. Ces besoins de base sont surtout : 1) la nourriture appropriée en quantité suffisante, 2) les besoins propres à la reproduction, mais aussi 3) les conditions climatiques appropriées pour la survie de l'espèce, par exemple la bonne quantité de pluie et la température adéquate. Ces conditions ne sont pas les mêmes pour tous les animaux et toutes les plantes.
Des conditions propres à chaque espèce
On peut penser aux ours polaires (Ursus maritimus Phipps 1774) qui trouvent les bonnes conditions pour leur survie en Arctique. Il ne nous viendrait pas à l'idée de chercher un membre de la famille des caméléons (Chamaeleonidae) dans cette région du globe. À l’opposé, certains animaux comme les cacatoès, membres de la famille des Cacatuidae (proches parents des perroquets), se trouvent dans les forêts chaudes de l’Indonésie, inutile de les chercher en Amérique du Nord. Certaines plantes ont également des besoins précis (température, pluie, etc.), on peut penser aux nombreuses espèces de la famille des cactus (Cactaceae) qui se trouvent dans des conditions désertiques, là où il y a peu de pluie (figure 2).
Isolées des autres
Au cours des millions d’années qui ont façonné notre planète et la vie qui s’y trouve, certains habitats sont isolés et évoluent indépendamment des autres endroits semblables. On peut penser à une île sur l’océan : il est possible qu’elle soit tellement loin des autres îles (2 000 km) que les espèces qui s’y trouvent ne sont plus en contact avec les individus de la même espèce ailleurs dans le monde. L’archipel des Îles Galapagos en est l’exemple bien connu. Les habitants de ces îles évoluent, cumulent des adaptations et des mutations génétiques, ce qui résulte après des millions d’années, en des espèces différentes. Si les deux espèces venaient à se rencontrer à nouveau, elles ne pourraient plus se reproduire ensemble puisque l’isolation a résulté en des espèces distinctes, même si elles sont semblables.
Habitats isolés
L’isolement des espèces ne se produit pas uniquement sur les îles perdues au milieu de l’océan; le phénomène se produit aussi avec le sommet des hautes montagnes, les habitats distincts comme les tourbières ou les dunes de sable par exemple. Une région isolée des autres par une chaîne de montagne est aussi une situation où les espèces éloignées physiquement les unes des autres, évoluent indépendamment à cause de leur isolement.
Endémisme : espèce unique à certaines régions du globe
Quand une espèce ne se trouve que dans un endroit et nulle part ailleurs dans le monde, on parle alors d’endémisme. Par exemple, on peut dire que les ours polaires sont endémiques à l’Arctique. Souvent, les régions qui présentent de l’endémisme sont bien définies géographiquement. Par exemple, le kauri (Agathis australis (D. Don) Loudon 1829), une espèce d’arbre géant, ne se trouve que dans le nord de l’Île du Nord de la Nouvelle-Zélande. On dit donc que le kauri est endémique à cette région. Un autre exemple bien connu : le koala [(Phascolarctos cinereus (Goldfuss 1817)] est endémique à l’Australie.
Dans d’autres cas, ce sont les habitats particuliers d’une région précise qui sont source d’endémisme. Par exemple, la Réserve de la biosphère d’El Cielo au Mexique, présente une situation d’isolation très intéressante parce que les sommets abritent des forêts pluvieuses qui sont isolées par l’altitude des conditions désertiques rencontrées en basse altitude. Cet endroit abrite un très grand nombre d’espèces, y compris des espèces rares de plantes et d’animaux dont plusieurs espèces sont endémiques (pins, salamandres, arachnides et insectes).
Endémisme en microbiologie
Il est à noter que le terme “endémisme” est aussi fréquent en microbiologie. À tort ou à raison, il est employé pour qualifier la dynamique de propagation de certaines maladies liées à une bactérie ou à un virus. Par exemple, si une maladie est en pleine progression, on la qualifie d’épidémique, si cette épidémie est à l’échelle mondiale, on parle alors de pandémie. Pour contraster avec cette situation de progression, on emploie le mot endémique pour qualifier une maladie qui n’est plus en progression et qui est restreinte à une région géographique donnée où elle est nouvellement arrivée. En microbiologie, on considère qu’il est possible qu’une maladie devienne endémique dans une région où elle était auparavant absente, après avoir été en phase épidémique ou pandémique.
Espèce spécialiste
Lorsqu'une espèce est étroitement associée à un habitat mais n’est pas restreinte géographiquement, on parle plutôt d’espèces spécialistes. Par exemple, le coléoptère Platypsyllus castoris Ritsema 1869 de la famille des Leiodidae est un insecte parasite qui ne vit que sur les castors ! Castor canadensis Kuhl 1820 et Castor fiber Linnaeus 1758. Le premier se trouve en Amérique du Nord tandis que l’autre vit en Europe et en Asie. Nous parlerons donc dans ce cas d’espèces spécialistes des castors et non d'espèces endémiques aux castors. En général, on parle d’endémisme pour des restrictions géographiques, mais par contre on parle d’espèces spécialistes pour une étroite association à un habitat particulier qui n’est pas restreint géographiquement.
El Cielo et ses cavernes
La région de “El Cielo” est une réserve naturelle inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO (figure 3). C’est un endroit situé en altitude avec une végétation luxuriante et particulière. Entre autres, on y trouve des pins et des bouleaux qui ne se trouvent que dans cette région. Le sol est composé de roches calcaires, ce qui a généré un karst complexe et encore mal connu. Les espèces troglobies (spécialistes des cavernes) qui s’y trouvent, ne se rencontrent nulle part ailleurs sur la planète. Plusieurs espèces de scorpions, d’araignées et de coléoptères ne sont connues que dans cette réserve de la biosphère.
D’autres exemples
La réserve d’El Cielo au Mexique est un excellent exemple d’endémisme en Amérique du Nord, mais il y en a d’autres tout aussi extraordinaires sur la planète. La Nouvelle-Zélande, par exemple, possède un taux d’endémisme de 95% ! Ce qui veut dire que 95% des plantes et des animaux de ce pays ne se trouvent qu'à cet endroit du globe. Madagascar est aussi un excellent exemple avec des centaines de plantes et animaux qui ne se trouvent que sur cette île. Madagascar a cependant été victime de l’exploitation sauvage des humains : il ne reste pratiquement plus rien de ce qui a été, il y a une centaine d’années, un endroit où se trouvaient une faune et une flore uniques au monde.
La perte d’espèces et la baisse de la diversité biologique sont des exemples frappants qui sont malheureusement généralisables à l’ensemble de la planète. La disparition des animaux est un problème accentué par l’activité humaine. La conscientisation de cette situation est à l’origine de différents mouvements de conservation de la nature, et même de disciplines scientifiques vouées à mieux comprendre le phénomène.
Auteur : Pierre Paquin
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