Un spécialiste des fossiles se nomme un paléontologue. À la base, il s’agit d’un géologue qui se spécialise dans les traces et les restes des êtres vivants du passé.
Paleo - = "ancien",
- onto - = "être",
- logue ou - logiste = "la parole" ou le " le discours"; désigne un spécialiste dans le domaine en lien avec les premières parties du mot.
Un fossile est une trace, habituellement préservée dans la roche, qu’un être vivant a laissé de son existence. La plupart du temps, ce sont des animaux morts depuis des millions d’années (figure 1). Ces traces se sont formées parce que des animaux morts se sont retrouvés enfouis dans le sol ou dans le fond des océans, puis se sont décomposés dans un matériel qui s’est transformé pour créer de nouvelles roches. La présence de ces êtres en décomposition modifie le processus de formation de ce type de roche (appelée roche sédimentaire, voir géologue) de telle sorte qu’on retrouve non plus un corps en décomposition, mais de la roche qui constitue une trace fidèle de l’être vivant qui s’y trouvait.
La plupart du temps, ce sont les parties les plus dures des êtres vivants qui laissent les traces les mieux définies dans la roche. Par exemple, les mollusques comportent souvent des coquilles dures qui se fossilisent très bien (figure 2). D’ailleurs, la plupart des gens découvrent leurs premiers fossiles en examinant les pierres sédimentaires, qui sont très communes, particulièrement la pierre calcaire. Dans la région de Montréal, il n’est pas rare de trouver des fossiles d’organismes marins puisque la région repose essentiellement sur de la roche calcaire.
Toutefois, les coquillages ne sont pas les seules parties plus “dures” qui forment des fossiles puisque les os des animaux constituent aussi une matière dure qui se fossilise bien. Par exemple, pour un poisson fossilisé, on ne trouve habituellement que les traces des os du poisson. Les parties les moins “dures” de l'anatomie (yeux, langue, peau) ne laissent pas de traces fossiles décelables dans la plupart des cas (figure 3).
Nous pouvons aussi penser aux traces fossiles des gros animaux, comme les dinosaures, dont des squelettes fossilisés sont parfois trouvés. On trouve rarement des squelettes entiers et/ou en bonne condition. La plupart du temps, il s'agit de parties seulement. Ces fossiles proviennent d’individus qui ont été ensevelis dans un marais par exemple, ou encore recouverts par un glissement de terrain, dans une coulée de lave, ou dans des cendres volcaniques. Habituellement les conditions qui ont favorisé la fossilisation d'un individu a probablement aussi causé la fossilisation d'autres individus. Dans ce cas, on parle de sites fossilifères qui révéleront la présence de plusieurs individus ou de plusieurs espèces qui vivaient dans des conditions et des époques semblables. Qui n'a pas rêvé de découvrir un squelette fossile d’un dinosaure comme ceux appartenant au genre † Triceratops (figure 4) ? Cela est tout à fait possible ! Il faut cependant regarder aux bons endroits de la planète, ce que nous négligions de faire quand nous avions 10 ans et que ce type de quête apparaissait comme une urgence à accomplir ! Aidés par les connaissances acquises au cours des deux derniers siècles, les paléontologues peuvent orienter leur recherche en fonction des animaux visés, ce qui a mené à la découverte de magnifiques spécimens, dont certains sont exposés dans les musées.
Il est vrai que les parties les plus dures des animaux se fossilisent bien, mais dans certaines conditions, il est aussi possible que des structures plus frêles se fossilisent. Ainsi, des fossiles de plantes (figure 5), d’insectes, ou des détails de la peau de certains animaux sont aussi connus et particulièrement informatifs. Ces fossiles peuvent parfois être abondants dans les sites fossilifères appropriés, mais dans l’ensemble, la fragilité de ces êtres vivants fait en sorte qu’ils sont moins fréquents que les coquillages, par exemple.
Un des intérêts des fossiles est de pouvoir étudier des êtres vivants qui ont existé sur Terre, mais qui sont aujourd’hui disparus. Les fossiles sont la seule voie possible pour en savoir plus. Parfois, il s’agit de la disparition d’une espèce précise, par exemple le célèbre tyrannosaure († Tyrannosaurus rex Osborn 1905); parfois il s’agit de genres entiers († Triceratops, † Mammuthus, † Smilodon); mais dans certains cas, ce sont des classes entières qui ont disparues. Difficile à croire, mais un des groupes d'animaux qui a connu le plus de succès avec pas moins de 22 000 espèces répertoriées à ce jour, a complètement disparu de la surface de la Terre. Ce sont les trilobites (classe † Trilobita), un groupe d’animaux marins qui se trouvait dans tous les océans (figure 6). Grâce aux fossiles trouvés, nous savons qu’ils occupaient une grande diversité de niches écologiques. Leurs corps fortement sclérifiés (doté d’un exosquelette dur, comme les crabes par exemple) ont laissé beaucoup de traces fossiles, ce qui nous permet d’en savoir beaucoup à leur sujet. Les trilobites n’ont pas de descendants connus mais ce sont des arthropodes. La qualité de la préservation nous révèle parfois avec une surprenante précision, des détails anatomiques, écologiques et même comportementaux. Les trilobites ont vécu de 521 millions d’années à 252 millions d’années, mais ont cependant complètement disparu dans l'extinction de masse du Permien. Qu’est ce qui a causé cette extinction de milliers d’espèces ? L’hypothèse actuelle la plus populaire concerne le réchauffement des océans. De quoi frémir si on songe au changement climatique actuel.
Il existe aussi certains fossiles spectaculaires qui consistent en des traces de pas d'animaux faits dans des sols mous ou boueux. Ces sols se sont transformés en pierre et conservent à tout jamais les empreintes faites dans le sol par des animaux aujourd' hui disparus (figure 7). La profondeur de ces empreintes et la distance entre les traces nous donnent des informations à propos du poids ou de la taille des animaux qui sont passés par là, il y a des millions d‘années.
Il existe aussi un autre type de fossile tout aussi extraordinaire : les spécimens préservés dans l’ambre. À l’origine, il s'agissait de résine sécrétée par des végétaux comme les conifères, il y a de cela des millions d'années. Depuis, cette résine s’est fossilisée pour donner cette pierre translucide à couleur de miel, qui est utilisée couramment pour faire des bijoux. D’ailleurs, l’ambre est la seule pierre qui soit directement d’origine végétale. Fraîchement sécrétée par la plante toutefois, cette résine est particulièrement collante. On peut penser à la gomme de pin ou de sapin que sécrètent ces arbres de nos jours. Il y a de cela des millions d’années, à l'époque où cette résine était encore collante, des insectes se sont englués dans cette matière qui s’est fossilisée depuis. Il en résulte des spécimens parfaitement préservés à l'intérieur de ces pierres (figure 8), surtout des arthropodes mais aussi des plantes et des petits animaux. Les fossiles dans la pierre normale peuvent difficilement être observés dans tous les angles, mais ce n’est pas le cas pour ces fossiles, puisque la pierre d’ambre permet un examen dans tous les angles. Un autre particularité de ce type de fossile, c’est qu‘il permet aux être vivants fragiles - comme les insectes - d’être parfaitement conservés, ce qui est peu fréquent dans les autres types de fossiles. La plupart des espèces conservées dans l’ambre sont des espèces éteintes, mais représentent les ancêtres des espèces actuelles, ce qui est d’un grand intérêt pour mieux comprendre l’évolution de la vie.
Il n’est pas nécessaire que les animaux soient très anciens pour constituer des fossiles. Il existe des fossiles d'animaux qui sont encore vivants de nos jours. Toutefois, lorsqu'il s'agit d’espèces disparues, l'information contenue dans ces témoins du passé prend une grande importance pour pousser plus loin nos connaissances. C‘est particulièrement vrai pour les disparitions récentes comme celle des moas et des mammouths, dont certains fossiles exceptionnels ont été découverts dans des cavernes, ou conservés dans la glace dans le cas des mammouths. Dans ces cas extraordinaires, l’ADN de ces spécimens n’est pas entièrement dégradé. On qualifie ce matériel génétique d’ADN ancien, et peut même être séquencé en grande partie.
Enfin, mentionnons un autre type de ressource fossilifère : les fosses à bitume (figure 9). Moins connues que les autres sources fossiles, il n'en demeure pas moins que la qualité (et la quantité) des spécimens qu’on y trouve est exceptionnelle. Les fosses à bitume (tar pits) sont des accumulations souterraines de produits pétroliers (comme le goudron et l'asphalte) qui se glissent jusqu’à la surface par des failles dans le roc. Cette huile s’accumule sur la surface et forme des mares gluantes et collantes qui ont emprisonné des plantes et des animaux qui y sont tombés il y a plusieurs dizaines de milliers d'années. Avec le temps, l’asphalte a fossilisé les restes de ces êtres vivants. L’examen du contenu de ces fosses a révélé des sites riches en espèces maintenant disparues qui sont particulièrement bien préservées. La plupart sont des fossiles d'insectes, mais aussi d’animaux comme les herbivores qui s’y sont aventurés en quête d’eau, et des prédateurs croyant pouvoir saisir facilement une proie engluée qui s’y sont fait prendre à leur tour. Le site La Brea Tar Pits situé à Los Angeles est sans doute un des sites de fosses à bitume le mieux connus. Plus de 160 000 fragments de fossiles de tigres à dent de sabre y ont été trouvés, ce qui a permis de mieux connaître cet animal disparu.
De façon générale, l’étude des fossiles des êtres vivants qui peuplaient la terre autrefois, est une source d’information d’une très grande richesse qui permet d’en savoir beaucoup sur l'évolution de notre planète. Par exemple, avec la taille des dinosaures et celle des anciens insectes ou des animaux éteints, il y a une constante qui montre que ces formes de vies étaient de beaucoup plus grande taille que celles présentes aujourd'hui. Pourquoi ? La meilleure hypothèse pour expliquer cette tendance lourde des formes de vies anciennes vers les formes plus récentes est que l’oxygène de l’air a été plus riche que les valeurs actuelles. C’est l’étude d’un grand nombre de fossiles qui a permis l’élaboration d’un tel scénario scientifique. Un autre exemple : nous savons aussi que les premières formes de vie apparues sur terre sont les bactéries. Comment sait-on cela ? Hé oui, c’est grâce à des fossiles de bactéries trouvées dans des pierres qui elles, ont pu être datées par les géologues à 3,5 milliards d’années. Combien d’autres découvertes ferons-nous encore grâce aux fossiles ? Bien malins ceux qui peuvent répondre à cette question.
Auteur : Pierre Paquin