Le Québec compte 20 espèces de Philodromidae, mais sept espèces additionnelles sont considérées comme probables et traitées ici. Au Québec et au Canada, les Philodromidae sont bien connus grâce aux révisions taxonomiques de Dondale (1964), de Dondale et Redner (1968, 1969, 1975, 1976), de Sauer et Platnick (1972), et à la synthèse publiée par Dondale et Redner (1978b).
Roberts (1995) considère que les Thomisidae et les Philodromidae ne forment qu’une seule famille caractérisée par une apparence de crabe et des déplacements latéraux. Mais la plupart des arachnologues les traitent comme deux familles distinctes, un point de vue que nous adoptons. Les Philodromidae ont de longues pattes agiles et se déplacent avec une grande rapidité, contrairement aux Thomisidae, dont les mouvements sont beaucoup plus lents. Les déplacements rapides et irréguliers des Philodromidae permettent de les repérer facilement sur un drap de battage, mais ils sont difficiles à attraper.
La plupart des Philodromidae vivent associés à la végétation, où ils trouvent refuge parmi les aiguilles ds conifères et dans les anfractuosités des écorces et des branches (Dondale et Redner 1978b). Les soies spécialisées des pattes (scopula) assurent une bonne prise sur le substrat (Comstock 1940). Lorsqu’ils sont au repos ou se sentent menacés, ils adoptent une posture de protection : le corps est appuyé contre le substrat, les pattes I et II sont étendues en avant dans l’axe du corps, les pattes IV sont étendues vers l’arrière le long de l’abdomen et les pattes III agrippent fermement le substrat (Kaston 1948).
Il existe un dimorphisme sexuel chez les Philodromidae. Les mâles sont plus petits que les femelles et présentent des motifs de coloration différents. Roberts (1995) mentionne que la couleur de ces araignées change pour s’harmoniser avec le substrat sur lequel elles se trouvent, ajoutant au mimétisme créé par les motifs qu’elles arborent (Gertsch 1949).
Le genre Philodromus est le plus riche de cette famille au Québec. Il comprend 14 espèces confirmées et quatre probables. Ces espèces sont très similaires et l’examen des pièces génitales mâles et femelles est nécessaire pour une identification fiable. Philodromus cespitum (fig. 1970) est le plus commun : il est largement réparti et récolté fréquemment par battage de la végétation. Curieusement, les autres Philodromus sont beaucoup plus difficiles à dénicher et leur habitat est encore inconnu.
Les deux sous-espèces Philodromus rufus quartus et P. rufus vibrans sont très similaires morphologiquement, particulièrement les femelles qu’il est nécessaire de disséquer pour une identification sûre. Dondale et Redner (1968) ont montré que la séquence de mouvements effectués lors des parades de séduction des mâles diffère entre les deux : P. rufus vibrans fait vibrer ses pattes antérieures pour séduire la femelle, ce que P. rufus quartus ne fait pas.
Les Philodromus tissent, à la jonction des petites branches, des sacs d’oeufs, confectionnés avec une soie blanche (Comstock 1940). Certaines espèces, comme P. minutus, pondent leurs oeufs à l’extrémité d’une feuille, qui est ensuite pliée et attachée avec de la soie. Les Philodromus gardent leur oeufs en demeurant aux aguets près de l’endoit où le sac est déposé.
Les espèces du genre Ebo sont pâles, munies de très longues pattes et difficiles à déceler dans la végétation. Gertsch (1949) mentionne que cette coloration pâle les confond aussi avec le sable et que les Ebo tombés au sol sont presque invisibles. Ebo pepinensis est une espèce connue d’une seule mention au Québec (Paquin et al. 2000). Il est problable qu’elle soit plus répandue, mais qu’elle passe simplement inaperçue.
Les Thanatus sont associés au sol, où ils se déplacent avec rapidité (Gertsch 1949). Les espèces de ce genre se reconnaissent au motif en losange de leur abdomen. Les sacs d’oeufs ont la forme d’une double lentille convexe et sont fixés à la végétation.
Les deux espèces de Tibellus du Québec se reconnaissent à leur forme allongée et à leurs couleurs qui rappellent la paille dorée. Elles sont souvent récoltées en fauchant la végétation et les herbes hautes. Leurs sacs d’oeufs sont tissés au milieu de l’été. Les femelles les attachent dans la haute végétation et les protègent contre les agresseurs (Comstock 1940, Kaston 1948). Les jeunes araignées éclosent à l’automne et passent l’hiver à ce stade. Les deux espèces du Québec sont holarctiques. Thomas (1949) rapporte qu’en Europe, les femelles confectionnent parfois un second sac à la fin de l’été.